Lorsqu’un immeuble en copropriété est inclus dans le périmètre d’une ASL ou d’une AFUL, il est fréquent que les charges de l’ASL soient appelées par le syndicat des copropriétaires de l’immeuble, mélangées avec les autres charges de la copropriété.
Cet usage peut provenir de la volonté des rédacteurs des statuts de l’ASL de considérer le syndicat des copropriétaires de l’immeuble comme membre de l’Association Syndicale.
En toute hypothèse, il est bien plus pratique pour l’ASL d’adresser sa facture, pour tout l’immeuble, au Syndic de Copropriété , qui se chargera lui même de la répartir entre les copropriétaires. Certains règlements de copropriété stipulent une solidarité de tous les copropriétaires pour l’ensemble des charges de l’immeuble envers l’ASL. Clause dangereuse qui revient à ce qu’un copropriétaire peut être tenu de toutes les charges de l’immeuble.
Ce procédé n’est pas conforme aux principes du droit des ASL.
La jurisprudence affirme de plus en plus nettement que les membres des ASL sont les copropriétaires individuellement, et non les syndicats de copropriété.
Nous avons exposé qu’un arrêt de la Cour de cassation du 9 décembre 1998 (qui n’était pas le premier en ce sens) a réaffirmé, cette fois avec retentissement, ce principe. En 1998, la Cour se réfugiait encore derrière les termes des statuts qui définissaient comme membre de l’Association "tous propriétaire ou copropriétaire".
En 2010 la Cour d’appel d’Aix en Provence peut exposer nettement le principe de base, qui apparait évident aujourd’hui :
"un syndicat de copropriétaires n’est pas propriétaire des parties communes et ne peut donc être membre d’une ASL ; seuls les copropriétaires en sont individuellement membres ; qu’il en résulte que nonobstant les stipulations du règlement de copropriété de l’îlot J, seuls les copropriétaires sont redevables des charges envers l’ASL ;"
(28 juin 2010).
En outre, les charges d’ASL sont de nature différentes des charges de copropriété. La charge ASL est attachée au bien, en cas d’impayé, elle se transfère au propriétaire suivant (attention !), sous le régime d’une prescription trentenaire, quinquennale pour les charges postérieures à 2008 .
La charge de copropriété est attachée à la personne du copropriétaire, sous le régime d’une prescription décennale. Le propriétaire suivant n’est tenu que des charges appelées à compter de son arrivée (mais qui peuvent avoir été décidées avant).
L’attachement de la charge ASL au bien immobilier est trop souvent oubliée en cas de faillite ou d’insolvabilité irrémédiable.
En toute logique, les ASL ou AFUL devraient appeler leurs charges indépendamment des syndicats de copropriété, par des appels distincts.
Cependant, la jurisprudence hésite à appliquer sévèrement ce principe lorsque les charges sont contestées. En effet, le rejet des demandes de charges formulées à l’encontre d’un immeuble entier peut bloquer le fonctionnement de l’ensemble immobilier. Les juridictions ne manquent pas d’utiliser l’absence de réaction de la défense sur la question de l’appartenance du syndicat à l’ASL ou AFUL.
Un arrêt de la Cour de cassation du 1er décembre 2009 valide ainsi la condamnation d’un syndicat de copropriété au paiement de charges d’une ASL, au motif que l’appartenance du syndicat à l’ASL n’avait pas été contestée. Un arrêt de la Cour d’Aix en Provence peut ainsi affirmer : "Il n’est pas contesté que le syndicat des copropriétaires de la résidence G.... A... est de plein droit membre de l’association foncière urbaine libre" pour valider la condamnation d’un syndicat à payer les charges (26 novembre 2010).
La réconciliation de ces exigences contradictoires pourrait résider dans le fait de considérer le syndicat comme ayant reçu le mandat de collecter les charges de l’ASL ou AFUL et de les répartir entre les copropriétaires. Il conviendrait de l’inscrire dans les statuts et règlements ( mais le droit français admet pleinement les mandats non écrits ou tacites).
La solution n’est pas parfaite au regard de l’objet (la mission) des syndicats de copropriété : l’entretien des parties communes. Elle est applicable lorsque sont concernées les installations de chauffage de distribution d’eau, d’ascenseur, qui, à l’intérieur de l’immeuble, peuvent être considérées comme des parties communes. Pour les espaces verts, services ou équipements extérieurs à l’immeuble, le principe est plus difficilement justifiable.